Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Blog VOM : Géopolitique - Mondialisation - Société- Religions - Spiritualité - Actualité...
13 juin 2015

Histoire de l'Eglise (6 à 7)

 

CHAPITRE 6 : GUIDES PAR LA FOI
Préparatifs pour quitter Nauvoo  
Les dirigeants de l'Église parlaient depuis 1834 de déplacer les saints vers les Montagnes Rocheuses où ils pourraient vivre en paix. Avec les années, les dirigeants envisagèrent des sites précis avec les explorateurs et étudièrent des cartes pour trouver le bon endroit où s'installer. A la fin de 1845, les dirigeants de l'Église avaient en leur possession les renseignements les plus récents concernant l'Ouest.  
Comme les persécutions s'intensifiaient à Nauvoo, il devint évident que les saints devraient partir. Dès novembre 1845, Nauvoo était une ruche bourdonnante de gens en train de se préparer. On appela des capitaines de cent, de cinquante et de dix pour diriger les saints pendant leur exode. Chaque groupe de cent créa un ou plusieurs ateliers de charronnerie. Charrons, menuisiers et ébénistes travaillaient jusque tard dans la nuit à préparer le bois et à construire les chariots. Des membres furent envoyés dans l'Est acheter du fer, et les forgerons fabriquaient le matériel nécessaire pour le voyage et les outils agricoles dont on aurait besoin pour coloniser une nouvelle Sion. Les familles rassemblaient la nourriture et les articles ménagers et remplissaient les récipients d'entreposage de fruits séchés, de riz, de farine et de médicaments. Travaillant ensemble pour le bien de tour, les saints en accomplirent plus qu'on ne l'aurait cru possible en aussi peu de temps.  
Epreuves d’un exode hivernal  
L'évacuation de Nauvoo devait à l'origine avoir lieu en avril 1846. Mais comme la milice de l'Etat menaçait d'empêcher les saints de partir vers l'Ouest, les douze apôtres et d'autres édiles tinrent en hâte conseil le 2 février 1846. Ils convinrent qu'il était impérieux de partir immédiatement pour l'Ouest, et l'exode commença le 4 février. Sous la direction de Brigham Young, le premier groupe de saints entreprit le voyage avec ardeur. Mais cette ardeur devait affronter une grande épreuve, car il y avait de nombreux kilomètres à parcourir avant de trouver du répit dans des camps permanents après avoir affronté la fin de l'hiver et un printemps exceptionnellement pluvieux.  
Pour échapper à leurs persécuteurs, des milliers de saints durent tout d'abord traverser le Mississippi, qui était très large, jusqu'en Iowa. Le voyage commença très tôt à être dangereux, lorsqu'un bœuf  lança une ruade qui fit un trou dans une barque transportant un certain nombre de saints, et que la barque coula. Un observateur vit les malheureux passagers s'agripper à des lits de plumes, à des bouts de bois, «à des planches, à tout ce qui leur tombait sous la main, et danser comme des bouchons sur l'eau à la merci des vagues glaciales et incessantes... Certains grimpèrent au sommet du chariot, qui ne coula pas tout à fait et se retrouvèrent dans une position plus confortable, tandis qu'on voyait les vaches et les boeufs qui étaient à bord nager vers la rive d'où ils étaient venus[1].» Finalement, tous furent hissés sur des bateaux et conduits de l'autre côté.  
Quinze jours après la première traversée, le fleuve gela pendant un certain temps. Bien que la glace fût glissante, elle supporta les chariots et les attelages et facilita la traversée. Mais le froid causa beaucoup de souffrances aux saints qui devaient avancer péniblement à travers la neige. Quand ils campèrent à Sugar Creek, de l'autre côté du fleuve, un vent constant apporta de la neige qui tomba sur une épaisseur de près de vingt centimètres. Ensuite le dégel rendit le sol boueux. Tout autour, au-dessus et en dessous, les éléments s'unissaient pour rendre l'existence misérable aux deux mille saints blottis dans des tentes, des chariots et des abris construits en hâte en attendant l'ordre de continuer.  
La partie la plus difficile du voyage fut la première, la traversée de l'Iowa. Hosea Stout écrit: «Je me préparai pour la nuit en dressant une tente temporaire à l'aide de draps de lit. A ce moment-là, ma femme était à peine capable de se mettre sur son séant et mon petit garçon, malade, avait une forte fièvre et ne se rendait même pas compte de ce qui se passait autour de lui[2].» Beaucoup d'autres saints souffrirent aussi considérablement.  
Tout est bien 
La foi, le courage et la détermination de ces saints leur permit de continuer malgré le froid, la faim et la mort de leurs proches. William Clayton fut appelé à être dans un des premiers groupes à quitter Nauvoo et laissa sa femme, Diantha, chez les parents de celle-ci, à un mois seulement d'accoucher de son premier enfant. Le fait de devoir avancer opiniâtrement sur des chemins boueux et de camper sous des tentes glaciales alors qu'il se faisait du souci pour le bien-être de Diantha était une rude épreuve pour ses nerfs. Deux mois plus tard, il ne savait toujours pas si elle avait accouché sans complication, mais finalement il reçut la joyeuse nouvelle qu'un «beau gros garçon» était né. Presque tout de suite après avoir appris cette nouvelle, William s'assit et écrivit un cantique qui non seulement avait une signification toute particulière pour eux, mais allait devenir, pendant des générations, un cantique d'inspiration et de reconnaissance pour les membres de l'Église: «Venez, venez», et les vers célèbres exprimaient sa foi et la foi des milliers de saints qui chantèrent au milieu de l'adversité: «Tout est bien! Tout est bien![3]» Comme les membres qui les ont suivis, ils trouvèrent la joie et la paix qui sont la récompense du sacrifice et de l'obéissance dans le royaume de Dieu.  
Winter Quarters 
Il fallut cent trente et un jours aux saints pour parcourir les cinq cents kilomètres de Nauvoo jusqu'aux colonies de l'ouest de l'Iowa où ils passeraient l'hiver de 1846-47 et se prépareraient pour l'émigration vers les Montagnes Rocheuses. Cette expérience leur apprit beaucoup de choses sur fart de voyager qui allaient les aider à traverser plus rapidement les seize cents kilomètres des grandes plaines américaines, ce qui fut fait l'année suivante en cent onze jours environ.  
Plusieurs colonies de saints s'étiraient le long des deux rives du Missouri. Winter Quarters, la plus grande, était sur la rive ouest, au Nebraska. Elle devint rapidement la patrie de quelque trois mine cinq cents membres de l'Église, qui vécurent dans des maisons de rondins et des trous creusés à flanc de coteau et constitués de terre et de saules. Jusqu'à deux mille cinq cents saints vécurent dans et autour de ce que l'on appela Kanesville, du côté Iowa du Missouri. Leur vie dans ces colonies était presque aussi difficile que quand ils étaient en route. Au cours de l'été, ils souffrirent de la malaria. Quand vint l'hiver et que l'on ne disposa plus de nourriture fraîche, ils souffrirent d'épidémies de choléra, du scorbut, de maux de dents, d'héméralopie (réduction importante de la vision lorsque la lumière est faible) et de fortes diarrhées. Des centaines de personnes moururent.  
Et pourtant la vie continuait. Selon Mary Richards, dont le mari, Samuel, était en mission en Ecosse, les femmes passaient leurs journées à nettoyer, repasser, laver, faire des couvertures, écrire des lettres, faire des repas avec leurs maigres provisions et s'occuper de leurs enfants. Elle nota avec bonne humeur les occupations des saints à Winter Quarters, notamment des activités telles que discussions théologiques, bals, réunions de l'Église, fêtes et réveils de frontière.  
Les hommes travaillaient ensemble et se réunissaient souvent pour parler des projets de voyage et du futur lieu d'installation des saints. Ils travaillaient régulièrement en collaboration pour rassembler le bétail qui paissait dans la prairie dans les environs du camp. Ils travaillaient dans les champs, gardaient le périmètre de la colonie, construisaient et exploitaient un moulin à farine et préparaient les chariots pour le voyage, souffrant souvent d'épuisement et de maladie. Leur travail était en partie un travail d'amour désintéressé, puisqu'ils préparaient les champs et faisaient les semailles qui seraient moissonnées par les saints qui les suivraient.  
John, fils de Brigham Young, appela Winter Quarters «le Valley Forge (haut lieu historique de la guerre d'indépendance des Etats-Unis, N.d.T.) du mormonisme». Il y habitait près du cimetière et voyait «les petits cortèges funèbres qui passaient si souvent devant la porte». Il dit combien pauvre et uniforme était l'ordinaire de sa famille, constitué de pain de maïs, de bacon salé et d'un peu de lait. La bouillie et le lard devenaient si écœurants que manger était comme prendre des médicaments, et il avait du mal à avaler[4]. Seuls la foi et la consécration des saints les soutinrent pendant cette période éprouvante.  
Le bataillon mormon 
Pendant que les saints étaient en Iowa, les recruteurs de l'armée américaine demandèrent aux dirigeants de l'Église de fournir un contingent d'hommes pour participer à la guerre contre le Mexique, qui avait commencé en mai 1846. Les hommes, à qui on finit par donner le nom de bataillon mormon, devaient traverser le sud du pays jusqu'en Californie et seraient payés, vêtus et nourris. Brigham Young encouragea les hommes à s'enrôler, parce que cela permettrait de lever de l'argent pour rassembler les pauvres de Nauvoo et aider les familles des soldats. Le fait de collaborer avec le gouvernement dans cette entreprise montrerait aussi la loyauté des membres de l'Église à leur pays et leur donnerait une bonne raison de camper temporairement sur des terres publiques et indiennes. Finalement, cinq cent quarante et un hommes acceptèrent les conseils de leurs dirigeants et s'enrôlèrent dans le bataillon. Ils furent accompagnés de trente-trois femmes et de quarante-deux enfants.  
La perspective d'aller à la guerre était aggravée, chez les membres du bataillon, par la tristesse d'abandonner leurs femmes et leurs enfants à un moment difficile. William Hyde écrit:  
«L'idée de quitter ma famille à un moment aussi critique ne se décrit pas. Elle était loin de l'endroit où elle était née, perdue dans une prairie solitaire, sans aucun autre abri qu'un chariot, écrasée par un soleil brûlant, avec la perspective que les vents froids de décembre la trouveraient au même endroit morne et désolé.  
«Ma famille se composait de ma femme et de deux petits enfants qui restaient en la compagnie d'un père et d'une mère âgés et d'un frère. La plupart des membres du bataillon laissaient une famille... Quand allions-nous les retrouver, Dieu seul le savait. Néanmoins nous n'estimions pas devoir murmurer[5].» 
Le bataillon partit vers le sud-ouest et fit trois mille deux cent cinquante kilomètres jusqu'en Californie, souffrant du manque de nourriture et d'eau, d'insuffisance de repos et de soins médicaux et de l'allure rapide de la marche. Les soldats servirent de troupes d'occupation à San Diego, à San Luis Rey et à Los Angeles. A la fin de leur année d'enrôlement, ils furent démobilisés et autorisés à rejoindre leurs familles. Leurs efforts et leur loyauté au gouvernement des Etats-Unis leur valurent le respect de ceux qui les dirigeaient.  
Après leur démobilisation, beaucoup de membres du bataillon restèrent en Californie pour y travailler quelque temps. Un certain nombre d'entre eux se rendirent plus au nord sur l'American River et étaient employés à la scierie de John Sutter lorsqu'on y découvrit de l'or en 1848, ce qui provoqua la célèbre ruée vers l'or de Californie. Mais les frères de l'Église ne restèrent pas en Californie pour profiter de cette occasion de faire fortune. Leur cœur était auprès de leurs frères et sœurs qui traversaient péniblement les plaines américaines vers les Montagnes Rocheuses. L’un d'eux, James S. Brown, explique:  
«Je n'ai plus jamais vu ce riche endroit de la terre et je ne le regrette pas, car j'ai toujours eu un objectif plus élevé que l'or... Certains penseront peut-être que nous ne voyions pas où était notre intérêt; mais après plus de quarante ans, nous regardons en arrière sans regrets, bien que nous ayons vu des fortunes s'édifier dans le pays et que beaucoup de choses nous aient donné la tentation de rester. Les gens disaient: « Ici il y a de l'or dans le roc, de l'or sur les collines, de l'or dans les ruisselets, de l'or partout... et vous pouvez faire fortune en peu de temps.» Nous en étions bien conscients. Mais le devoir nous appelait, notre honneur était en jeu, nous avions fait alliance entre nous, il y avait un principe qui jouait; car pour nous c'était Dieu et son royaume d'abord. Nous avions des amis et des parents dans le désert, oui, dans une terre désertique, vierge, et qui savait dans quel état ils étaient? Nous ne le savions pas. C'était donc le devoir avant le plaisir, avant la richesse et, ainsi motivés, nous partîmes[6].» Ces frères savaient bien que le royaume de Dieu avait une valeur bien plus grande que toutes les choses matérielles de ce monde et ils firent leur choix en conséquence.  
Les saints du Brooklyn 
La plupart des saints se rendirent dans les Montagnes Rocheuses en faisant la traversée par voie de terre à partir de Nauvoo, mais un groupe de saints de l'est des Etats-Unis prit le chemin de la mer. Le 4 février 1846, soixante-dix hommes, soixante-huit femmes et cent enfants montèrent à bord du Brooklyn et quittèrent le port de New York pour un voyage de vingt-sept mille kilomètres jusqu'à la côte californienne. Pendant leur voyage, deux enfants naquirent, que l'on appela Atlantic et Pacific, et douze personnes moururent.  
Le voyage, qui dura six mois, fut très pénible. Les passagers étaient serrés les uns contre les autres dans la chaleur des tropiques, et ils n'avaient que de la nourriture avariée et de l'eau croupie. Après avoir dépassé le cap Horn, ils s'arrêtèrent dans l’île Juan Fernandez pour s'y reposer pendant cinq jours. Caroline Augusta Perkins écrit: «La vue de la terre ferme et la possibilité de pouvoir la fouler une fois de plus sous nos pieds nous soulageait tellement de la vie sur le bateau, que nous en profitâmes avec reconnaissance.» Ils se baignèrent, lavèrent leurs vêtements dans l'eau fraîche, cueillirent des fruits et des pommes de terre, prirent du poisson et des anguilles et se promenèrent dans l’île, explorant une «caverne du genre de celle de Robinson Crusoé[7]». 
Le 31 juillet 1846, après un voyage marqué de violentes tempêtes, d’une nourriture de plus en plus rare et de longues journées de navigation, ils arrivèrent à San Francisco. Certains y restèrent et fondèrent une colonie appelée New Hope (Nouvelle-Espérance), tandis que d'autres traversaient les montagnes pour rejoindre les saints dans le Grand Bassin, à l’est.  
Le rassemblement continue 
De tous les coins de l'Amérique et de nombreux pays, par toutes sortes de moyens de transport, à cheval ou à pied, les convertis fidèles quittaient leurs maisons et le lieu où ils étaient nés pour rejoindre les saints et entreprendre le long voyage vers les Montagnes Rocheuses.  
En janvier 1847, Brigham Young publia le texte inspiré «La Parole et la Volonté du Seigneur concernant le camp d'Israël» (D&A 136:1), qui devint la constitution régissant le mouvement des pionniers vers l'Ouest. Des groupes furent organisés et chargés de prendre soin des veuves et des orphelins qui se trouvaient parmi eux. Les relations avec les autres devaient être exemptes de toute méchanceté, de toute convoitise, de toute querelle. Les gens devaient être heureux et montrer leur reconnaissance par la musique, la prière et la danse. Par l'intermédiaire du président Young, le Seigneur dit aux saints: «Allez faire ce que je vous ai dit, et ne craignez point vos ennemis» (D&A 136:17).  
Comme le premier convoi pionnier se préparait à quitter Winter Quarters, Parley P Pratt revint de sa mission en Angleterre et annonça que John Taylor le suivait avec un don des saints anglais. Le lendemain, frère Taylor arriva avec l'argent de la dîme envoyé par ces membres pour aider les voyageurs, preuve de leur amour et de leur foi. Il apporta aussi des instruments scientifiques qui se révélèrent d’une grande utilité pour déterminer l'itinéraire pionnier et les aider à s'instruire sur leur environnement. Le 15 avril 1847, le premier convoi, avec Brigham Young à sa tête, se mit en route. Pendant les deux décennies qui suivirent, quelque soixante-deux mine saints allaient les suivre sur les prairies en chariots et en charrettes à bras pour se rassembler en Sion.  
De merveilleux spectacles ainsi que des vicissitudes attendaient ces voyageurs en cours de route. Joseph Moenor se rappela avoir eu du mal à arriver dans la vallée du lac Salé. Mais il vit des choses qu'il n'avait encore jamais vues: de grands troupeaux de bisons et de grands cèdres sur les collines[8]. D'autres se souvinrent avoir vu de vastes étendues de tournesols en fleur.  
Les saints eurent aussi des expériences enrichissantes pour la foi, qui rendirent plus légères les exigences physiques imposées à leur corps. Après un long jour de voyage et un repas cuit à feu ouvert, hommes et femmes se rassemblaient en groupes pour parler des activités du jour. Ils parlaient des principes de l'Evangile, chantaient des cantiques, dansaient et priaient ensemble.  
La mort frappa souvent les saints pendant qu'ils avançaient lentement vers l'Ouest. Le 23 juin 1850, la famille Crandall comptait quinze personnes. A la fin de la semaine, sept étaient mortes de ce terrible fléau qu'était le choléra. Les cinq jours suivants, cinq autres membres de la famille moururent. Le 30 juin, sœur Crandall mourut avec l'enfant auquel elle venait de donner le jour.  
Les saints souffrirent beaucoup au cours de leur voyage jusqu'à la vallée du lac Salé, mais un esprit d'unité, de collaboration et d'optimisme régna. Unis par leur foi et leur engagement vis-à-vis du Seigneur, ils trouvèrent de la joie au milieu de leurs épreuves.  
C’est là
Le 21 juillet 1847, Orson Pratt et Erastus Snow, du premier convoi de pionniers, précédèrent les immigrants dans la vallée du lac Salé. Ils y trouvèrent une herbe si haute qu'on pouvait s'y cacher, ce qui promettait des terres à cultiver, et plusieurs ruisseaux qui serpentaient dans la vallée. Trois jours plus tard, Brigham Young, qui souffrait de la fièvre des montagnes, fut amené dans son chariot à l'embouchure d'un canyon qui donnait sur la vallée. Tandis qu'il contemplait l'endroit, il donna sa bénédiction prophétique à leur voyage: «Cela suffit. C'est là.»  
Lorsque les saints qui suivaient débouchèrent des montagnes, ils contemplèrent, eux aussi, leur terre promise! Cette vallée avec son lac salé qui luisait dans le soleil de l'ouest, était l'objet des visions et des prophéties, la terre dont eux et des milliers derrière eux avaient rêvé. C'était leur lieu de refuge, où ils deviendraient un peuple puissant au milieu des Montagnes Rocheuses.   Plusieurs années plus tard, Jean Rio Griffiths Baker, une convertie d'Angleterre, écrivit ce qu'elle éprouva quand elle contempla Salt Lake City pour la première fois. «La ville... est disposée en carrés ou en blocs, comme on les appelle ici; chacun contient quatre hectares et est divisé en huit lots, dont chacun a une maison. Je restai là à regarder. Il m'est difficile d'analyser mes sentiments, mais je pense que les principaux étaient la joie et la reconnaissance pour la protection qui nous avait été accordée à moi et aux miens pendant notre long et dangereux voyage[9].»  
Les pionniers des charrettes à bras 
Dans les années 1850, les dirigeants de l'Église décidèrent de constituer des convois de charrettes à bras afin de diminuer les frais et de pouvoir accorder une aide financière au plus grand nombre possible d'émigrants. Les saints qui voyagèrent de cette façon ne mettaient que cent livres de farine et des quantités limitées de provisions et de biens dans une charrette et la poussaient ensuite sur les plaines. De 1856 à 1860, dix convois de charrettes à bras se rendirent en Utah. Huit d'entre eux arrivèrent à bon port dans la vallée du lac Salé, mais deux d'entre eux, les convois de charrettes à bras Martin et Willie, furent surpris par un hiver précoce et beaucoup de vies périrent.  
Nellie Pucell, pionnière d'un de ces malheureux convois, eut son dixième anniversaire dans les plaines. Son père et sa mère moururent pendant le voyage. Lorsque le groupe approcha des montagnes, le temps était glacial, les rations étaient épuisées, et les saints étaient trop affaiblis par la faim pour continuer. Nellie et sa sœur s'effondrèrent.  
Quand elles eurent presque perdu tout espoir, le chef du convoi s'approcha d'elles avec son chariot. Il mit Nellie dans le chariot et dit à Maggie de l'accompagner à pied, en s'y agrippant pour se soutenir. Maggie eut de la chance, parce que la marche forcée lui épargna les gelures.  
Quand ils arrivèrent à Salt Lake City et que l'on enleva les chaussures et les bas que Nellie avait portés pour traverser les plaines, la peau se détacha parce qu'elle était gelée. Dans la douleur, on dû amputer les pieds de cette courageuse jeune fille qui marcha sur les genoux le reste de sa vie. Elle se maria plus tard et donna le jour à six enfants, entretenant sa maison et élevant une belle postérité[10]. Sa détermination en dépit de sa situation, et la gentillesse de ceux qui s'occupèrent d'elle sont un exemple de la foi et de la disposition de ces premiers membres de l'Église à faire des sacrifices. Leur exemple est un legs de foi pour tous les saints qui les suivent.  
Un homme, qui avait traversé les plaines avec le convoi de charrettes à bras Martin, vécut de nombreuses années en Utah. Un jour, il se trouvait avec un groupe de personnes qui commencèrent à critiquer vivement les dirigeants de l'Église d'avoir permis aux saints de traverser les plaines en n'ayant pas davantage de réserves ou de protection que celles que fournissait un convoi de charrettes à bras. Le vieillard écouta jusqu'à ce qu'il ne pu plus le supporter; puis il se leva et dit avec beaucoup d'émotion:  
«J'étais dans ce convoi et ma femme y était... Nous avons souffert au-delà de tout ce que vous pouvez imaginer, et beaucoup sont morts de faim et de froid; mais avez-vous jamais entendu un survivant de ce convoi se livrer à la moindre critique?... [Nous avons] traversé les plaines avec la connaissance absolue que Dieu vit, car, dans notre détresse, nous avons appris à le connaître.  
«J'ai tiré ma charrette à bras, alors que j'étais si faible et si las de maladie et de manque de nourriture, qu'il m'était quasiment impossible de mettre un pied devant l'autre. J'ai regardé devant moi et j'ai vu une étendue de sable ou une montée, et je me suis dit: Je ne pourrai aller que jusque là et alors je devrai renoncer, car je ne pourrai pas arriver de l'autre côté en tirant cette charge... J'ai continué jusqu'à ce sable, et quand j'y suis arrivé, c'est la charrette qui a commencé à me pousser.  
Je me suis retourné bien des fois pour voir qui poussait ma charrette, mais mes yeux n'ont vu personne. J'ai su alors que les anges de Dieu étaient là. «Ai-je regretté d'avoir décidé de venir avec les charrettes à bras? Non. Ni à ce moment-là, ni à aucun instant de ma vie depuis lors. Ce que nous avons dû payer pour faire la connaissance de Dieu, cela a été une joie de le payer, et je suis reconnaissant d'avoir eu la bénédiction de venir avec le convoi de charrettes à bras de Martin.[11]» La version anglaise du livre de cantiques contient un chant concernant les premiers membres de l'Église qui ont courageusement accepté l'Evangile et fait un long trajet pour vivre aux avant-postes de la civilisation:  
Bâtisseurs de la nation, Ouvrant la voie en chemin, Ils furent un tremplin pour les générations Dans leurs gestes quotidiens. Posant de nouveaux et solides fondements, Faisant les frontières reculer, Poussant toujours plus avant, Heureux, révérés pionniers.  
Leur exemple nous enseigne à vivre avec plus de foi et de courage dans notre pays:  
Leur mot d'ordre était le service, L'étoile de leur ciel, l'amour. Leur infaillible flambeau était le courage, Rayonnant tout alentour. Chaque jour un fardeau de moins, Chaque jour un cœur consolé, Chaque jour un espoir plus grand, Heureux, révérés pionniers.[12]    

[1] Juanita Brooks, éd., On the Mormon Frontier: The Diary of Hosea Stout, 2 vol. (1964)1:114.
[2] Juanita Brooks, On the Mormon Frontier, 1:117.
[3] James B. Allen, Trials of Discipleship: The Story of William Clayton, a Mormon (1987), 202.
[4] Russell R. Rich, Ensign to the Nations (1972), 92.
[5] Readings in LDS Church History: From Original Manuscripts, éd. William E. Berrett et Alma P. Burton, 3 vol. (1965), 2:221.
[6] James S. Brown, Giant of the Lord: Life of a Pioneer (1960), 120.
[7] Caroline Augusta Perkins, citée dans «The Ship Brooklyn Saints», Our Pioneer Heritage (1960), 506.
[8] Utah Semi-Centennial Commission, The Book of the Pioneers (1897), 2 vol., 2:54; dans Archives de l'Eglise.
[9] «Jean Rio Griffiths Baker Diary», 29 sept. 1851; dans Archives de l'Eglise.
[10] Story of Nellie Pucell Unthank, Heart Throbs of the West, comp. Kate B. Carter, 12 vol. (1939-51), 9:418-20.
[11] William Palmer, cite dans David O. McKay, Pioneer Women, Relief Society Magazine, janv. 1948, 8.
[12] They, the Builders of the Nation, Hymns, n° 36.

CHAPITRE 7 : UNE BANNIERE DRESSEE POUR LES NATIONS
Après avoir réussi à faire traverser les plaines par le premier convoi jusqu'en Utah, Brigham Young tourna son attention vers l'établissement du royaume de Dieu dans le désert. Grâce à sa vision et à sa direction, ce qui était un désert total devint une civilisation prospère et un havre pour les saints. La franchise avec laquelle il dirigeait permit aux saints de voir les possibilités qu'offrait leur nouvelle patrie et les aida à avancer dans leur effort pour édifier le royaume de Dieu.  
Deux jours après l'arrivée du premier convoi, Brigham Young et plusieurs des Douze montèrent sur un promontoire à flanc de montagne dont le président Young avait eu la vision avant de quitter Nauvoo. Ils contemplèrent la vaste étendue de la vallée et prophétisèrent que toutes les nations du monde seraient les bienvenues en ce lieu et que les saints y connaîtraient la prospérité et la paix. Ils appelèrent la colline Ensign Peak, d'après l'Ecriture d'Esaïe qui promettait: «Il élèvera une bannière pour les nations, il rassemblera les exilés d'Israël» (Esaïe 11:12)[1].  
Le premier acte public du président Young, le 28 juillet 1847, fut de choisir un site central pour un temple et de mettre des hommes au travail pour en planifier la conception et la construction. Posant sa canne à l'endroit choisi, il dit: «Ici nous construirons un temple à notre Dieu.» Cette déclaration dut réconforter les saints qui, si peu de temps auparavant, avaient été obligés d'abandonner le culte au temple.  
En août, les dirigeants de l'Église et la plus grande partie du premier convoi de pionniers retournèrent à Winter Quarters pour préparer leurs familles à se rendre dans la vallée l'année suivante. Peu après leur arrivée, Brigham Young et le Collège des Douze eurent le sentiment que le moment était venu de réorganiser la Première Présidence. En qualité de président du Collège des Douze, Brigham Young fut soutenu comme président de l'Église. Il choisit Heber C. Kimball et Willard Richards comme conseillers, et les saints soutinrent leurs dirigeants à l'unanimité.  
Première année dans la vallée 
Deux autres convois de saints arrivèrent dans la vallée du lac Salé avant la fin de l'été 1847, et les membres, dont le nombre s'élevait à près de deux mille, furent organisés pour former le pieu de Salt Lake. On fit des semailles tardives, mais la récolte fut maigre, et lorsque arriva le printemps, beaucoup souffraient du manque de nourriture. John R. Young, qui était enfant à l'époque, écrit:  
«Lorsque l'herbe commença à pousser, la famine était devenue grave. Pendant plusieurs mois, nous n'eûmes pas de pain. Du bœuf, du lait, de l'herbe à cochon, des ségos [racines de plantes] et des chardons constituaient notre ordinaire. J'étais le berger, et pendant que j'étais dans les champs à surveiller le troupeau, je mangeais des tiges de chardon jusqu'à en avoir l'estomac aussi rempli que celui d'une vache. Finalement la faim fut si forte que papa descendit de la branche la vieille peau de bœuf picorée par les oiseaux, et on en fit le plus délicieux des potages[2].» 
Les colons collaboraient généreusement et partageaient entre eux et purent ainsi survivre à cette période difficile. En juin 1848, les colons avaient ensemencé entre deux mille et deux mille cinq cents hectares de terre, et la vallée commençait à avoir un aspect vert et fertile. Mais à la consternation des saints, des nuées de sauterelles noires s'abattirent sur les cultures. Les colons firent tout ce qu'ils pouvaient. Ils creusèrent des tranchées et détournèrent des cours d'eau sur les sauterelles. Ils tapèrent sur les insectes à coups de bâton et de balai et essayèrent de les brûler, mais leurs efforts furent inutiles. Les sauterelles continuaient à arriver et leur nombre paraissait infini. John Smith, patriarche et président du pieu de Salt Lake, demanda un jour de jeûne et de prière. De grands vols de mouettes apparurent bientôt dans le ciel et s'abattirent sur les sauterelles. Susan Noble Grant dit à propos de cette expérience: «Nous eûmes la surprise de voir les mouettes gober, presque avec voracité, les sauterelles qui grouillaient partout[3].» Les saints regardèrent avec joie et admiration. Ils étaient sauvés.  
Les saints travaillèrent avec énergie et avec foi en dépit de leur situation difficile, et ils ne tardèrent pas à faire de Grands progrès. Un voyageur, en route pour la Californie, traversa Salt Lake City en septembre 1849 et leur fit cet éloge: «Je ne me suis jamais trouvé parmi un peuple plus ordonné, plus sérieux, plus industrieux et plus poli que celui-ci, et il est incroyable de voir tout ce que ces gens ont fait en si peu de temps dans ce désert. Dans cette vine, où il y a de quatre à cinq mille habitants, je n'ai pas rencontré un seul oisif, aucune personne qui ait l’air d'un vagabond. Ils ont de bonnes perspectives de récolte, et il y a, dans tout ce qu'on voit, un esprit et une énergie qu'on ne retrouve dans aucune des localités, aussi grandes ou petites soient-elles, où je suis allé[4].»  
Explorations  
A la fin de l'été 1848, Brigham Young fit de nouveau le voyage de Winter Quarters à la vallée du lac Salé. Quand il arriva, il se rendit compte que les saints avaient besoin d'apprendre quelles ressources existaient dans leur nouvel environnement. On apprit beaucoup des Indiens qui vivaient dans la région, mais le président Young envoya également des membres de l'Église en exploration pour découvrir les propriétés médicinales des plantes et les ressources naturelles existantes.  
Il envoya d'autres groupes d'explorateurs trouver des emplacements à coloniser. Au cours de leur voyage, ces membres découvrirent des dépôts minéraux, du bois en abondance, des sources d'eau et des herbages ainsi que des régions convenant pour la colonisation. Pour empêcher la spéculation immobilière, le prophète recommanda aux saints de ne pas diviser le terrain qui leur était confié pour le vendre à d'autres. La terre était leur intendance et devait être gérée avec sagesse et industrie et non pour un gain financier.  
Pendant l'automne 1849, on créa le fonds perpétuel d'émigration sous la direction du président Young. Sa raison d'être était d'aider les pauvres qui n'avaient pas le moyen de voyager à rejoindre le gros de l'Église. Au prix de gros sacrifices, beaucoup de saints contribuèrent au fonds, et des milliers de saints purent ainsi faire le voyage jusqu'à la vallée du lac Salé. Dès qu'ils le pouvaient, ceux qui étaient aidés étaient censés rembourser l'aide qu'ils avaient reçue. Ces fonds furent utilisés pour en aider d'autres encore. Grâce à cet effort coopératif, les saints firent du bien à ceux qui étaient dans le besoin.
Des missionnaires répondent à l'appel  
Alors que le bourdonnement du travail et de la vie domestique remplissait l'air, Brigham Young s'est occupé des affaires de l'Église. Lors de la conférence générale tenue le 6 octobre 1849, il chargea plusieurs membres des Douze, ainsi que des missionnaires nouvellement appelés, de partir en mission à l'étranger. Ils acceptèrent ces appels en dépit du fait qu'ils allaient devoir laisser derrière eux leurs familles, leurs maisons neuves et beaucoup de tâches inachevées. Erastus Snow et plusieurs anciens ouvrirent l'œuvre missionnaire en Scandinavie, tandis que Lorenzo Snow et Joseph Toronto se rendaient en Italie. Addison et Louisa Barnes Pratt retournèrent dans l'ancien champ de mission d'Addison dans les îles de la Société. John Taylor fut envoyé en France et en Allemagne. Au cours de leur voyage vers l'Est, les missionnaires croisèrent des saints en route pour la nouvelle Sion des Montagnes Rocheuses.  
Dans leur champ de mission, les missionnaires furent témoins de miracles et baptisèrent beaucoup de gens. Quand Lorenzo Snow, qui devint plus tard président de l'Église, prêcha en Italie, il vit un garçon de trois ans qui était sur le point de mourir. Il y vit une occasion de guérir l'enfant et d'ouvrir le cœur des gens de la région. Cette nuit-là il pria longtemps et avec ferveur pour avoir les instructions de Dieu, et le lendemain son compagnon et lui jeûnèrent et prièrent pour le garçon. Cet après-midi-là, ils lui firent l'imposition des mains et firent une prière silencieuse pour avoir de l'aide dans leurs efforts. Le garçon dormit paisiblement toute la nuit et fut miraculeusement guéri. La nouvelle de cette guérison se répandit dans les vallées du Piémont, en Italie. Les portes s'ouvrirent aux missionnaires et les premiers baptêmes de la région eurent lieu[5].  
En août 1852, lors d'une conférence spéciale tenue à Salt Lake City, cent six anciens furent appelés à partir en mission vers des pays du monde entier. Ces missionnaires, ainsi que ceux qui furent appelés plus tard, prêchèrent l'Evangile en Amérique du Sud, en Chine, en Inde, en Espagne, en Australie, à Hawaï et dans le Pacifique sud. Dans la plupart de ces régions, ces missionnaires eurent peu de succès au départ. Mais ils plantèrent des semences qui eurent pour résultat l'entrée dans l'Église d'un grand nombre de personnes lors d'efforts missionnaires ultérieurs.  
Edward Stevenson fut appelé à la mission de Gibraltar, en Espagne. Cet appel signifiait qu'il retournait là où il était né, et il y proclama hardiment l'Evangile rétabli à ses concitoyens. Il fut arrêté parce qu'il prêchait et passa un certain temps en prison, jusqu'à ce que les autorités s'aperçoivent qu'il instruisait les gardes, et qu'il avait presque converti l'un d'eux. Libéré, il baptisa deux personnes, et dès janvier 1854, une branche de dix membres était organisée. En juillet, en dépit du fait que six membres étaient avec l'armée britannique en Asie, la branche comptait dix-huit membres dont un soixante-dix, un ancien, un prêtre et un instructeur, ce qui fournissait à la branche les dirigeants dont elle avait besoin pour continuer à grandir[6].
Les gouvernements locaux de Polynésie française expulsèrent les missionnaires en 1852. Mais les saints convertis maintinrent l'Église en vie jusqu'à ce que de nouveaux efforts de prosélytisme eussent lieu en 1892. Les frères Tihoni et Maihea furent spécialement vaillants, car ils subirent l'emprisonnement et d'autres épreuves plutôt que de renier leur foi. Chacun d'eux essaya de maintenir les saints pratiquants et fidèles à l'Evangile[7].  
Pour ceux qui devinrent membres de l'Église en dehors des Etats-Unis, c'était le moment de se rassembler en Sion, ce qui signifiait se rendre en Amérique par bateau. Elizabeth et Charles Wood partirent en 1860 d'Afrique du Sud, où ils avaient travaillé plusieurs années pour gagner l'argent nécessaire à leur voyage. Elizabeth fit le ménage pour un homme riche, et son mari fit des briques jusqu'à ce qu'ils obtinssent les fonds nécessaires. Elizabeth fut transportée à bord du bateau dans un lit vingt-quatre heures après avoir accouché d'un fils, et on lui donna la cabine du capitaine pour qu'elle fût plus à l'aise. Elle fut très malade pendant le voyage et manqua à deux reprises de mourir, mais elle survécut et s'installa à Fillmore (Utah).  
Les missionnaires devinrent très chers aux saints dans les pays où ils servaient. Vers la fin de sa mission à Hawaï en 1857, Joseph F. Smith tomba malade d'une forte fièvre qui l'empêcha de travailler pendant trois mois. Il eut la bénédiction d'être confié aux bons soins de Ma Mahuhii, sainte hawaïenne fidèle. Elle le soigna comme s'il était son propre fils, et un puissant lien d'affection se créa entre eux. Des années plus tard, lorsqu'il fut président de l'Église, Joseph F. Smith rendit visite à Honolulu et juste après son arrivée, vit qu'on lui amenait une vieille femme aveugle qui tenait quelques belles bananes dans la main en cadeau. Il l'entendit crier: «Iosepa, Iosepa» (Joseph, Joseph). Il courut tout droit vers elle et la serra dans ses bras et l'embrassa encore et encore, lui tapotant la tête et disant: «Mama, Mama, ma chère vieille Mama[8]. »
Appels à coloniser 
De nombreuses localités furent fondées en Utah et au sud de l'Idaho et plus tard dans certaines parties de l'Arizona, du Wyoming, du Nevada et de Californie, par des personnes et des familles appelées lors de conférences générales. Brigham Young commanda la création de ces communautés où des milliers de nouveaux colons pouvaient vivre et cultiver la terre.   De son vivant, toute la vallée du lac Salé et beaucoup de régions avoisinantes furent colonisées. Dès 1877, année de la mort de Brigham Young, plus de trois cent cinquante colonies avaient été créées et en 1900 il y en avait presque cinq cents. Brigham Henry Roberts, une des autorités de l'époque, observa que le succès de la colonisation mormone provenait de «la loyauté du peuple à ses dirigeants et à ses sacrifices désintéressés et dévoués» dans l'exécution des appels reçus du président Young.[9] Les colons sacrifièrent le confort matériel, la fréquentation de leurs amis et parfois leur vie pour suivre un prophète du Seigneur.  
Aux réunions de conférence générale, le président Young lisait les noms des frères et de leurs familles qui étaient appelés à s'installer dans des régions reculées. Ces colons considéraient qu'on les appelait en mission et ils savaient qu'ils resteraient jusqu'à leur relève dans les lieux où ils étaient affectés. Ils se rendaient dans leur nouveau territoire à leurs propres frais et avec leur propre équipement. Leur succès dépendait de l'habileté avec laquelle ils utilisaient les ressources disponibles. Ils mesuraient et défrichaient des champs, construisaient des moulins à blé, creusaient des fossés d'irrigation pour amener de l'eau, clôturaient des pâturages pour leur bétail et construisaient des routes. Ils plantaient des cultures et créaient des jardins, construisaient des églises et des écoles et essayaient d'entretenir des relations amicales avec les Indiens. Ils s'entraidaient dans la maladie aussi bien que lors des naissances, des décès et des mariages.  
En 1862, Charles Lowell Walker fut appelé à s'installer dans le sud de l'Utah. Il assista à une réunion pour ceux qui avaient été appelés et écrivit: «J'ai appris ici un principe que je n'oublierai pas de si tôt. Il m'a montré que l'obéissance était un grand principe dans le ciel et sur la terre. Il y a maintenant sept ans que je travaille ici par tous les temps, en ayant faim et dans des situations difficiles, et j'ai fini par avoir une maison, avec beaucoup d'arbres fruitiers qui commencent tout juste à porter et à avoir belle allure. Eh bien, il faut que je quitte cela et que j'aille faire la volonté de mon Père céleste, qui décide souverainement pour le bien de ceux qu'il aime et le craignent. Je prie Dieu qu'il me donne la force d'accomplir d'une manière acceptable devant lui ce qui est requis de moi[10].»  
Charles C. Rich, membre du Collège des douze apôtres, reçut aussi un appel à participer à la colonisation. Brigham Young l'appela, lui et quelques autres frères, à partir avec leurs familles s'installer dans la Bear Lake Valley, à environ deux cent quarante kilomètres au nord de Salt Lake City. La vallée était située à une très haute altitude et était très froide et recouverte d'une épaisse couche de neige en hiver. Frère Rich venait de rentrer d'une mission en Europe et n'était pas pressé de déplacer sa famille et de recommencer depuis le départ dans des circonstances difficiles. Mais il accepta l'appel et, en juin 1864, arriva dans la Bear Lake Valley. L’hiver suivant fut particulièrement rigoureux et, au printemps, certains des autres frères avaient décidé de partir. Frère Rich se rendait compte que la vie ne serait pas facile dans ce climat froid mais dit:  
«Il y a eu beaucoup de vicissitudes, cela je le reconnais... et nous les avons subies ensemble. Mais si vous voulez aller ailleurs, c'est votre droit, et je ne veux pas vous en priver... Mais je dois rester ici, dussé-je rester seul. Le président Young m'a appelé ici, et c'est ici que je resterai jusqu'à ce qu'il me relève et me permette de partir.» Frère Rich et sa famille restèrent, et il devint pendant les quelques décennies qui suivirent le dirigeant d'une communauté prospère[11]. Comme des milliers d'autres, il obéit de bon cœur à ses dirigeants pour contribuer à l'édification du royaume du Seigneur.  
Relations avec les Indiens 
En pénétrant plus avant dans le territoire, les colons étaient souvent en rapport avec les Indiens. Au contraire de certains colons de l'Ouest, le président Young enseigna aux saints qu'ils devaient nourrir leurs frères et sœurs indigènes et essayer de les amener dans l'Église. On entreprit du prosélytisme parmi les Indiens à Fort Lemhi, dans la région de la Salmon River du territoire d'Idaho et dans la colonie de Elk Mountain (haut Colorado) dans le territoire d'Utah. Le président Young créa aussi des Sociétés de Secours dont les membres cousaient des vêtements pour leurs frères et sœurs indiens et réunissaient de l'argent pour les nourrir.  
Quand Elizabeth Kane, épouse de Thomas L. Kane, grand ami des saints, non membre de l'Église, traversa l'Utah, elle logea chez une mormone bien fatiguée. Elle ne fut pas très impressionnée par la femme jusqu'au moment où elle vit comment elle traitait les Indiens. Quand la sœur appela ses invités pour le dîner, elle adressa aussi quelques mots aux Indiens qui attendaient. Elizabeth demanda ce qu'elle avait dit aux Indiens et l'un des fils de la famille lui dit: «Ces étrangers sont arrivés avant vous, et j'ai cuisiné juste assez pour eux; mais votre repas est en train de cuire, et je vous appellerai dès qu'il est prêt.» Incrédule, Elizabeth demanda si elle allait vraiment nourrir les Indiens. Le fils lui dit: «Maman va les servir comme elle vous sert, et elle leur donnera une place à sa table.» Elle les servit et s'occupa d'eux pendant qu'ils mangeaient[12].  
Organisation des activités de la prêtrise et des auxiliaires  
A la fin de sa vie, le président Young clarifia et fixa certaines responsabilités importantes de la prêtrise. Il dit aux Douze de tenir des conférences dans tous les pieux. Sept nouveaux pieux et cent quarante paroisses furent ainsi créés un peu partout en Utah. Les devoirs des présidences de pieu, des grands conseils, des épiscopats, des présidences de collège furent clairement définis, et des centaines d'hommes furent appelés à remplir ces postes. Brigham Young recommanda aux membres de l'Église de mettre leur vie en ordre et de payer leur dîme, leurs offrandes de jeûne et leurs autres dons.  
En 1867, le prophète nomma George Q. Cannon surintendant général de l'Ecole du Dimanche et, au bout de quelques années, l'Ecole du Dimanche fut un élément permanent de l'organisation de l'Église. En 1869, il commença à donner à ses filles un enseignement officiel sur la façon de vivre avec modestie. En 1870, il étendit ces instructions à toutes les jeunes filles en créant la Retrenchment Association («retrench» signifie éliminer tout ce qui est excessif). Ce fut le commencement de l'organisation des Jeunes Filles. En juillet 1877, il se rendit à Ogden (Utah) pour organiser la première Société de Secours de pieu.  
Mort et legs de Brigham Young 
En tant que dirigeant, le président Young était un homme pratique et énergique. Il se rendait dans les colonies de l'Église pour instruire les saints et les encourager. Par le précepte et par l'exemple, il enseigna aux membres à s'appliquer dans leurs appels dans l'Église.   Evaluant sa vie, le président Young écrivit ce qui suit en réponse au rédacteur en chef d'un journal de New York:  

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Blog VOM : Géopolitique - Mondialisation - Société- Religions - Spiritualité - Actualité...
Blog VOM : Géopolitique  - Mondialisation - Société- Religions  - Spiritualité - Actualité...
Archives
Derniers commentaires
Publicité